Septième symphonie de Beethoven, une musique classique souvent utilisée dans le cinéma, par Christian Pastoret.

Aujourd’hui, je laisse la parole à mon collègue Christian Pastoret 😉

Tanguy

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Ludwig Van Beethoven (1770-1827)
Symphony No. 7 en La Majeur, Op. 92 – 2e mouvement (Allegretto)

Ce 2e mouvement de la 7e symphonie (1811-12) a été utilisé dans une trentaine de bandes originales de films. On peut comprendre pourquoi : dès les premières mesures, la mélodie, magnifique, d’abord douce et grave, permet de souligner la tension évoquée par des images :

https://www.latroika.com/mp3/tanguy-follio/blog/Ludwig van Beethoven – Symphony No 7 Allegretto- Muti-EXTRAIT 1.mp3

La tension est renforcée progressivement par la montée en puissance rythmique et harmonique. Chaque cycle de mélodie (sur 3×8 mesures) franchit un nouveau palier, débutant piano (uniquement les cordes) jusqu’au fortissimo (orchestre tutti).
La section de cordes est composée de Violons I, Violons II, Altos, Violoncelles I, et Violoncelles II et contrebasses (à l’unisson) :

Beethoven symphony 7

Depuis Beethoven, les violoncelles sont souvent scindés en violoncelles I (unisson avec les altos) et violoncelles II (unisson avec les basses).

Ouverture du mouvement

L’accord d’ouverture joué par les bois et les cors présente la tonalité principale du mouvement, La mineur :

Beethoven symphony 7

Hautbois : do – mi
Clarinettes en la : mi – la
Bassons : la – do
Cors en mi : mi – mi

La troisième mesure voit les bois et les cordes s’éteindre, et l’arrivée des altos et cordes graves. Vont suivre 5 cycles de mélodie, débutant tout en retenue, jusqu’à l’envolée dynamique.

Rythme :

Le mouvement se poursuit comme une marche funèbre (signature 2/4, tempo 76) avec répétition de la même figure rythmique (ostinato) sur 8 mesures, qui sera reprise par différentes sections :

Beethoven symphony 7

Piano

Mesures 3-26 : partie piano ; exposé du thème par les altos, violoncelles et contrebasses.

THÈME PRINCIPAL

Le thème est principalement portée par les altos I, mais il est difficile de distinguer une réelle mélodie avec chacune des parties prise séparément. En fait, « mélodie » et accompagnement sont intrinsèquement liés.

– Altos :

Beethoven symphony 7

https://www.latroika.com/mp3/tanguy-follio/blog/ALTOS I.mp3

Altos I seuls

https://www.latroika.com/mp3/tanguy-follio/blog/ALTOS II.mp3

Altos II seuls

– Les violoncelles et contrebasses complètent à la fois le thème et l’harmonie :

Beethoven symphony 7

https://www.latroika.com/mp3/tanguy-follio/blog/CELLOS I.mp3

Violoncelles I seuls

– Violoncelles II et contrebasses :

Beethoven symphony 7

https://www.latroika.com/mp3/tanguy-follio/blog/CELLOS II DB.mp3

Violoncelles II et contrebasses

Le thème est véritablement posé lorsque toutes les parties de cordes sont jouées simultanément :

Cordes


HARMONISATION

Indépendamment du rythme de marche, qui donne toute sa gravité au thème, on peut « déconstruire » le thème en accords (bien que ce genre de grille ne soit pas l’habitude en classique, mais habituellement réservé au rock et au jazz !).

On peut remarquer les cadences (V I E/Am et I V Am/E), le passage par la tonalité de C majeur (fin de la 1ère partie) et les enchaînements d’accords majeurs-mineurs (B/Bm puis A/Am) dans la 2e partie.

Accords, partie 1 :

Beethoven symphony 7

https://www.latroika.com/mp3/tanguy-follio/blog/Beethoven – 7e- Melodie part 1.mp3

Accords, partie 2 :

Beethoven symphony 7

https://www.latroika.com/mp3/tanguy-follio/blog/Beethoven – 7e- Melodie part 2.mp3

La troisième partie du thème est la répétition pianissimo de la deuxième partie.

Version orchestrale, mesures 1-26

https://www.latroika.com/mp3/tanguy-follio/blog/Ludwig van Beethoven – Symphony No 7 Allegretto-Muti MES 1-26.mp3

Ricardo Muti, Philadelphia Orchestra, 1979

Contre-chant

Mesures 27-50 : l’orchestre reprend pianissimo ; la mélodie est reprise par les seconds violons, et l’animation est créée par la variation du rythme des cordes graves, et l’arrivée du contre-chant par les altos et violoncelles.

Beethoven symphony 7

Les violons II reprennent à l’octave la partie des altos des mesures 3-26, les notes sont tenues et le timbre devient brillant.

Durant toute cette partie, violoncelles II et contrebasses jouent les mêmes notes que celles des mesures 3-26 (sans détailler les montées à l’octave et quelques exceptions), en variant la figure rythmique qui devient :

Beethoven symphony 7

https://www.latroika.com/mp3/tanguy-follio/blog/Beethoven – 7e- Rythm MES 27-50 – CELLOS II DB.mp3

Violoncelles II et contrebasses, figure rythmique des mesures 27-50

Les altos et violoncelles I en contre-chant jouent la même partie, des notes tenues et des notes enrichies d’ornements (mordants) qui vont se combiner aux violons II :

https://www.latroika.com/mp3/tanguy-follio/blog/Beethoven – 7e- Theme-MES 27-50-Violons II Violas Cellos.mp3

Violons II (son de violon), altos et violoncelles I (son de piano), mesures 27-50

Crescendo poco a poco

Mesures 51-74 : l’orchestre redémarre piano avec une augmentation progressive ; la mélodie est reprise à l’octave par les premiers violons ; les seconds violons reprennent à l’octave la partie précédente des altos ; les altos et violoncelles I démarrent en arpèges ; la figure rythmique des violoncelles II et contrebasses varie encore.

Beethoven symphony 7

La dynamique est créée par les arpèges [relativement simples, Am (la-do-mi), E (sol# si mi)…] et la rythmique syncopée :

https://www.latroika.com/mp3/tanguy-follio/blog/Beethoven – 7e- MES 51-67- Arp VA CELLOS I-Rythm VII DB.mp3

Mesures 51-66 : arpèges des altos et violoncelles I (son de piano) et rythmique des violoncelles II et contrebasses

Forte

Mesure 67-74: la fin de ce cycle va cette fois être reprise forte ; les hautbois et les bassons viennent appuyer la rythmique, qui va encore s’accentuer sur les dernières mesures avec les flûtes et les cors.

Beethoven symphony 7

Beethoven symphony 7

https://www.latroika.com/mp3/tanguy-follio/blog/Ludwig van Beethoven – Symphony No 7 Allegretto-Bernstein-MES 67-74.mp3

Mesures 67-74 : arrivée des bois et des cuivres
Bernstein, Wiener Philharmoniker, 1978

Fortissimo :

Mesures 75-90 : l’orchestre joue fortissimo avec les bois, les cuivres et les timbales. Certaines des parties précédentes (mesure 51-74) sont reprises par une section différente (glissement Violons I → Bois/Cuivres ; Violons II → Violons I ; Altos → Violons II).

Altos, violoncelles et contrebasses offrent un tourbillon de triolets complémentaires : altos et violoncelles I en triolets sur la première partie de la mesure, violoncelles II et contrebasses sur la deuxième partie :

Beethoven symphony 7

https://www.latroika.com/mp3/tanguy-follio/blog/Beethoven – 7e- Triolets MES 75-82 – CELLOS I – CELLOS II DB.mp3

Mesures 75-82 : triolets des violoncelles I (son de piano), violoncelles II et contrebasses

https://www.latroika.com/mp3/tanguy-follio/blog/Ludwig van Beethoven – Symphony No 7 Allegretto-Karajan-MES 75-90.mp3

Mesures 75-90 : fortissimo
Karajan, Berliner Philharmoniker,1977

De diminuendo à dolce :

Cette partie du mouvement se termine en douceur : diminuendo à la mesure 91 pour finir piano (dolce pour les bois) à la mesure 98. Les 3 mesures suivantes sont un rappel de la dernière partie du thème :

https://www.latroika.com/mp3/tanguy-follio/blog/Ludwig van Beethoven – Symphony No 7 Allegretto-Karajan-MES 91-101.mp3

Mesures 91-101 : diminuendo
Karajan, Berliner Philharmoniker,1977

Récapitulation :
A chacun des cycles, chacune des parties (thème, contre-chant, arpèges) est reprise par une section différente (variations des hauteurs et des timbres) ; la rythmique évolue, l’orchestre passe progressivement de piano à fortissimo, pour finir en douceur.

Beethoven symphony 7

Évolution des figures rythmiques :

Beethoven symphony 7

Suite du mouvement :

Le mouvement se poursuit en La majeur (mesures 102-138), pour revenir en mineur, avec reprise et variations du thème.

Le final (mesures 254-278) joue avec les variations de timbre des bois et cors :

Beethoven symphony 7

Mesures 254-260 : flûtes, hautbois, clarinettes, bassons et cors

https://www.latroika.com/mp3/tanguy-follio/blog/Ludwig van Beethoven – Symphony No 7 Allegretto-Barenboim MES 254-278.mp3

Final, mesures 254-278
Barenboim, Berliner Philarmoniker, 1989

«… la phrase rythmique s’élevant toujours d’octave en octave, arrive aux premiers violons qui, par un crescendo, la transmettent aux instruments à vent dans le haut de l’orchestre, où elle éclate alors dans toute sa force. Là-dessus la mélodieuse plainte, émise avec plus d’énergie, prend le caractère d’un gémissement convulsif; des rythmes inconciliables s’agitent péniblement les uns contre les autres; ce sont des pleurs, des sanglots, des supplications; c’est l’expression d’une douleur sans bornes, d’une souffrance dévorante… »

Hector Berlioz, (Étude critique des symphonies de Beethoven), à propos de l’Allegretto.

Je cherche des musiciens (cordes, vents…) sur Paris, afin d’interpréter mes compositions
(pièces de 2-3 minutes, de tendance « classique »).
Que vous soyez seul(e) ou un groupe déjà formé, merci de me contacter :
Christian Pastoret
cpastoret@free.fr

2 réflexions sur “Septième symphonie de Beethoven, une musique classique souvent utilisée dans le cinéma, par Christian Pastoret.”

  1. Belle analyse, bravo ! D’ailleurs Samuel Adler en fait également une analyse dans son livre d’orchestration (pp.134).

    Peux-tu nous donner la liste des films qui l’utilisent?

    Pas plus tôt qu’hier, au Festival de Film de Marrakech, j’ai vu un excellent film estonien en compétition : "Mushrooming" de Toomas Hussar (trailer ici http://www.youtube.com/watch?v=KYoXnkve_18). Il s’agit d’un homme politique qui se perd en forêt. Après avoir été retrouvé dans des circonstances ridiculisantes il doit en plus se présenter à la presse pour une affaire de corruption. Au début complètement abasourdi devant les questions insistantes des journalistes, il finit par faire un speech qui lentement convainc de mieux en mieux (les dupes). Quand j’entendais de la musique très loin, en mono, je n’arrivais pas à l’identifier ; puis, lentement, elle monte en puissance et en stéréophonie, et j’ai reconnu l’allegretto de la 7e dont tu parles ici !

    Donc on peut désormais ajouter ce film dans la liste 😉

  2. Bonjour FilmTunes et merci de tes commentaires
    La liste des films est longue… cf Wikipedia (!)
    Parmi eux, "The Fall (2006)", le discours final dans "Le Discours d’un Roi (2010)", la bande-annonce de "Des Hommes et des Dieux (2010)"…
    Je ne connais pas l’analyse de Samuel Adler, mais je la lirais avec plaisir 🙂

Les commentaires sont fermés.

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