Etudier à la loupe l’orchestration d’un extrait musical issu d’une bande originale

Nous parlions, l’autre jour avec Louar52, de l’écoute attentive des grands maîtres du classique et de la musique de film, dans le but de nous familiariser avec l’orchestration et l’instrumentation.

Je pense que malgré les écoutes globales des symphonies ou des œuvres de John Williams, beaucoup de choses nous échappent. Je crois qu’il ne faut pas hésiter à faire des arrêts sur images pour décortiquer certains passages écrits par nos compositeurs préférés (si l’on ne souhaite pas passer par la lecture du score, souvent introuvable en ce qui concerne la musique de film, du reste).

Quand j’ai un peu de temps, j’écoute une BO dans mon ordinateur, avec un logiciel enregistreur (bouton « record » armé). Chez moi, c’est Cool Edit Pro ou Wavelab. Audacity fait très bien l’affaire aussi.

J’enregistre un passage qui me plaît :

Et je me pose la question : qu’est-ce que j’entends ?

  • Crescendo initial :
  • Note jouée par des instruments graves. Contrebasses et timbales en trémolo, avec probablement du tuba pour donner un son plus rond (peut-être aussi du basson ?). Puis, intervention des autres cuivres et cordes medium au milieu du crescendo. Trombones et trompettes medium, peut-être des cors. Le Gong ne me permet pas de savoir s’il y a des bois.

  • Partie centrale :
  • Rythmique saccadée faite par des snaps de cordes (sûrement samplés) et des sons de cymbales (pour l’aspect métallique et tranchant). Dessous, on perçoit effet orchestral très efficace : on dirait un tapis de cordes frottées et des trompettes en sourdine. Puis une petite harpe mystérieuse introduit une pose d’accord clairement interprétée par des bois (clarinettes, haubois et flûtes) et des cordes dans le registre medium-aigu ainsi que quelques cors pour soutenir l’accord.

  • Avant dernier crescendo :
  • Dans la continuité de la partie centrale, ce deuxième crescendo est très bien amené. Le chevauchement est très important en orchestration. Les trompettes, par exemple, se greffent sur les notes de violons tandis qu’un effet synthétique (à moins que ce soit encore un tapis de cordes frottées) apporte un côté dissonant au crescendo, qui finit par se déchirer avec les tambours sans timbre (comme des toms). Le crescendo final peut commencer :

  • Crescendo final :
  • Des violoncelles aigus et alti viennent doubler la rytmique (snaps samplés) tandis que les cors (voir quelques trombones), pas trop gras mais bien ronds se posent en accord dissonant bougrement efficace. Cordes discrètes mais pas de timbales ou cymbales en crescendo à cet endroit. Les cuivres medium prédominants décrivent à eux seul une certaine tension. Quelque chose de bien costaud va arriver à cet endroit du film…. Un ponctuation percutante (hit de timbales, enclume, tambour… tout ce qui fait du bruit) vient clôturer cet extrait. X-Men2 n’est pas une comédie à l’eau de rose 😉

Je constate aussi que les effets orchestraux les plus persuasifs ne sont pas forcément construits en superposant un maximum d’instruments. Une petite note de harpe bien placée avec une note de cor suffit parfois à créer un suspense qui vous tient en haleine. On trouve beaucoup d’effets de ce genre dans des films comme Star wars, Jurassik Park ou Indiana Jones, entre les tutti orchestraux des scène épiques et d’action.

9 réflexions sur “Etudier à la loupe l’orchestration d’un extrait musical issu d’une bande originale”

  1. Guillaume Roussel

    Très intéressant, comme toujours!!
    On pourrais passer des heures à analyser la musique…Mais c’est très dommage qu’il y ait peu de partition de musiques de film. Je me suis toujours demandé pourquoi d’ailleurs. Plus tard avec Melodyne 2015, on aura l’analyse harmonique et orchestral d’un passage en appuyant sur "detect"….

  2. Bon moi j’ai du mal avec la retranscription littérale. J’ai vraiment besoin de VOIR un score pour comprendre. Alors au boulot Tanguy :-))))

    >"Mais c’est très dommage qu’il y ait peu de partition de musiques de film. Je me suis toujours demandé pourquoi d’ailleurs"

    Je pense que tout simplement ces partitions sont introuvables parce qu’elles sont juridiquement la propriété des studios, que le potentiel commercial de ces partitions est extrêmement faible. Philippe Rombi m’a dit un jour qu’il ne voulait pas me passer les partitions par peur de dévoiler ses trucs. Je crois que les raisons sont très diverses en fait.

    Il y a cependant des compositeurs qui passent leur partition sans aucun pb: Yared, Beltrami (sur son site), et Young qui donne des photocopies à ses fans!!! Un certain Guillaume Roussel (qui c’est ce mec? Il est connu? :-)) )

    En réalité, beaucoup de partitions d’orchestre de BOFS sont trouvables… sous le manteau. Les compositeurs sont parfois responsables de cette circulation mais également les chefs d’orchestre, les musiciens…

  3. >"Mais c’est très dommage qu’il y ait peu de partition de musiques de film."
    Je crois qu’en dehors des questions juridiques évoqués par Damien, il y a aussi le fait que beaucoup de musiques d’aujourd’hui sont produites à moitié sur ordi, et qu’il est difficile et inutile pour le compositeur de transcrire tous les effets utilisés.

    >"snaps de cordes (sûrement samplés)"
    Peut-être mais pour moi ce rythme est plutôt un col legno des cordes doublé par des staccati des trompettes (avec sourdines). Et comme tu dis c’est samplé : en effet ce sont au moins quatre trompettes qui jouent ces "staccati-cluster" et en même temps (à 08 ») d’autres trompettes en sourdines jouent un autre petit cluster tenu. Mais quel orchestre dispose d’autant de trompettes ??

    Avec l’ordi on peut faire beaucoup d’instrumentations dont les "anciens" ne pourrait que rêver. Par exemple Richard Strauss, dans sa "Symphonie alpestre", rêvait que les vents pourraient tenir des notes à l’infini, comme un orgue. Donc pour tenir les très longues notes de cluster du début de la symphonie, il conseille l’utilisation de l’aérophone que le flûtiste Bernhard Samuel avait inventé 1912…
    Wikipédia :
    "The use of Samuel’s Aerophone is prescribed in the orchestration notes along with the instrumentation. This device, invented by Belgian flautist Bernhard Samuel in 1912, is a bellows operated by a foot pedal with an air hose attached to the mouthpiece of woodwind instruments and aids the player to sustain long notes without interruption."

    Aujourd’hui avec l’ordinateur et la fonction loop ça ne poserait aucun problème !

    "Etudier à la loupe l’orchestration"
    Savez-vous où habite Tanguy ? Belle référence au lieu d’étude de notre petit maestro, que je salue au passage 😉

  4. J’habite à côté d’une commune qui s’appelle La Loupe (28)

    A propos des partitions proposées par les compositeurs, on en trouve des intéressantes (en interactif) sur le site du compositeur Erwann Kermorvant (en lien sur le blog de Guillaume).

  5. T’inquiètes j’ai compris col legno en ce qui me concerne 🙂

    "il y a aussi le fait que beaucoup de musiques d’aujourd’hui sont produites à moitié sur ordi, et qu’il est difficile et inutile pour le compositeur de transcrire tous les effets utilisés"

    Pas les grandes musiques de film dont parle sans doute Guillaume Roussel (puisqu’ici on parle de X-men 2): elles sont enregistrés par un orchestre donc elles sont forcément écrites.

    "Et comme tu dis c’est samplé : en effet ce sont au moins quatre trompettes qui jouent ces "staccati-cluster" et en même temps (à 08 ») d’autres trompettes en sourdines jouent un autre petit cluster tenu. Mais quel orchestre dispose d’autant de trompettes ??"

    Ce n’est pas forcément du sampling. C’est sans aucun doute du re-re. C’est devenu très très courant en BOF.

  6. étant nul en solfège, pour moi les partitions ne s’imposent pas… je sais bien que l’oreille ne fait pas tout et que l’étude de l’orchestration est un passage obligé si l’on veut progresser. Quand j’écoute une bof au casque (c’est fou la différence entre un casque de moyenne et haute qualite, avec le premier on perd la moitié des instrus !) j’imagine que je suis devant l’orchestre et j’essai de capter les différents instruments, toutes les variations, les constructions de crescendo etc… j’en loupe (tiens elle est bonne celle la… lol)c’est certain mais bon…je voulais remercier tanguy pour la peine qu’il se donne, ses analyses, ses astuces qu’ils nous fait partager : aujourd’hui j’en louperai un peu moins c clair ! pour un ptit amateur comme moi tout cela est précieux. tiens, je vais reécouter "le jour d’après" j’aime bien Harald KLOSER en autre.

    bien amicalement

  7. Ouais,bof
    je n’aime pas les musiques de Louar52.Pour moi tu ne seras jamais compositeur!
    tu dépends de matos ultra perfect
    mais réelement sait tu faire de la musique? De la vraie?
    Connais tu le piano?Le solfége?
    les notes?
    Tu n’es pas bon. Excuses moi si je suis direct et je ne pense que tu resteras un amateur..
    cordial

    jacques

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